Dispositif médical et Numérique en santé

Les dispositifs médicaux sont au service quotidien des patients et professionnels de santé. Et cela se vérifie encore à l’heure où ces dispositifs deviennent numériques et connectés.

La qualification d’un logiciel ou d’une application en santé en tant que dispositif médical dépend de sa fonction (finalité diagnostique, thérapeutique, de compensation d’un handicap ou de maîtrise de la conception) et de sa présentation. Ces éléments sont déterminants pour qualifier le produit de dispositif médical… ou non.

Pour mieux comprendre tous les enjeux mais aussi explorer tous les possibles que portent les DM numériques pour les usagers du système de santé, le Snitem a décidé de leur consacrer son premier dossier thématique.

PodcastPodcast

joris-galland

Les DM numériques au service d’une médecine 4P – Avec le Dr Joris Galland

Comment les DM numériques participent-ils de l’avènement d’une médecine prédictive, préventive, personnalisée et participative ?

Écouter le podcast

Parole d'usagerParole d'usager

claude-chaumeil

Les DM numériques peuvent renforcer la relation entre le patient et le soignant

4 questions à…

Claude Chaumeil, patient et enseignant, président de l’Association des diabétiques d’Île-de-France et vice-président de la Fédération française des diabétiques chargé de la stratégie patients, représentant de France Assos Santé au CA de la Société française de santé digitale (SFSD).

Le DM numérique rend-il les patients plus acteurs de leur(s) pathologie(s) ? Comment participe-t-il à renforcer l’observance ?

Cela dépend des applications et des DM qui leur sont proposés. En effet, certains sont relativement aisés d’utilisation tandis que d’autres requièrent une formation en amont et une acculturation. Et, parfois, même si la chose est prévue par les textes, en particulier par ceux inhérents à l’autorisation de mise sur le marché, la formation n’est pas toujours assurée. C’est alors aux patients de s’impliquer pour maîtriser leur(s) DM.

Plus largement, les DM numériques autonomisent le patient dans la mesure où, paradoxalement, ils leur donnent le choix de les utiliser ou pas en fonction de leurs appétences et, surtout, des contraintes et de la charge mentale auxquelles ils sont confrontés dans leur vie quotidienne. Par exemple, pour le diabète, la personne peut faire le choix de privilégier la pompe à insuline ou, au contraire, de revenir au stylo, simplement parce que ce dernier est, pour elle, plus facile à gérer. Il n’en reste pas moins que le DM numérique peut participer à l’autonomie du patient et à la prise de conscience, par ce dernier, des enjeux liés à son utilisation. Il contribue à l’adhésion au traitement, laquelle se fait par la confiance, la transparence et la formation.

Sur ce versant, les patients sont-ils suffisamment connectés et sollicités ?

À mon sens, ils pourraient l’être plus systématiquement, mais aussi plus tôt dans le processus de conception d’un DM, car leur regard et leur(s) expérience(s) peuvent être très utiles pour adapter les dispositifs médicaux aux usages concrets des patients. En effet, la plupart d’entre eux sont très complets, mais parfois complexes. Impliquer les patients permet de favoriser leur adoption dans la vie quotidienne. Certaines associations d’usagers et de patients collaborent avec les fabricants et les professionnels de santé dans la mise au point des DM numériques, mais cette collaboration pourrait aller encore plus loin !

Comment le DM numérique modifie-t-il la relation soignant-soigné ?

Il peut renforcer la relation entre le patient et le soignant, par exemple, en faisant remonter à ce dernier des données afin que l’un et l’autre interagissent. Cela facilite le suivi et évite les consultations inutiles. Celles-ci sont dès lors proposées en fonction des besoins du patient et non simplement parce qu’elles sont calées plusieurs mois l’avance. En somme, le DM numérique donne davantage de souplesse à la relation soignant-soigné et participe à l’amélioration organisationnelle du système de santé.

Mais attention, car, pour certains patients notamment âgés, la dimension numérique peut leur donner le sentiment de se sentir « dépossédés » dans leur relation avec leur(s) professionnel(s) de santé. Il y a donc un travail d’acculturation à faire auprès des patients pour qu’ils se saisissent pleinement de ces outils de télé-accompagnement, mais aussi de télésoin que sont les dispositifs médicaux numériques.

Quel regard portez-vous sur Mon Espace Santé ?

J’ai le sentiment que les professionnels de santé tardent à soutenir le projet comme si, à leurs yeux, ce n’était qu’une déclinaison du dossier médical qui, lui, n’avait pas fonctionné. Il y a quand même un apriori négatif. En outre, cet outil n’est pas connu des patients et donc pas utilisé par eux sauf pour consulter des documents. En effet, la plupart du temps, on ne retrouve encore que le DMP dans Mon Espace Santé alors qu’il a de bien plus grandes fonctionnalités.

La mise à jour des logiciels métiers des professionnels de santé permet le versement automatique de leurs actes dans ce dossier. Ce sera l’histoire de la santé de chacun que la mémoire des patients et de leurs soignants ne possède pas. La charge mentale des malades chroniques s’en trouvera allégée autant que le travail des professionnels gagnera en efficience.

Des données de santé protégées

Toute personne ou structure, publique ou privée, à but lucratif ou non lucratif, peut accéder aux données du Système national des données de santé (SNDS) sur autorisation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), en vue de réaliser un traitement de données présentant un intérêt public. Pour des projets de recherche, les demandes sont à déposer auprès de la Plateforme des données de santé (PDS). Elle est le point d’entrée unique des demandes d’autorisation d’accès au SNDS à des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation, avec pour mission d’assurer un traitement des demandes conforme au cadre réglementaire et dans les délais définis par la loi.

Sachant que les usagers restent propriétaires de leurs données de santé sur lesquelles ils peuvent, à tout moment, exercer des droits : en l’occurrence, un droit d’accès aux données, de rectification des données, de limitation des traitements, d’opposition aux traitements, d’effacement des données ou encore, à la portabilité des données.

ComprendreComprendre

visuel-comprendre

DM ou pas DM : comment faire la différence entre les solutions numériques ?

Les logiciels et les applications mobiles dans le domaine de la santé connaissent un essor considérable, qu’il s’agisse de leur nombre ou de leur diversité. Mais tous ne sont pas des dispositifs médicaux. Voici l’essentiel pour identifier ces derniers.

Pour être qualifié(e) de DM, un logiciel ou une application doit :

  • Être à usage médical, c’est-à-dire avoir une finalité diagnostique, thérapeutique ou de compensation d’un handicap ;
  • Donner un résultat propre au bénéfice d’un seul patient ;
  • Effectuer une action sur les données implémentées (analyse, par exemple) « afin de fournir une information médicale nouvelle » (ANSM).

Ex : logiciel ou une application destiné(e) à diagnostiquer un cancer de la peau à partir d’une photo ; calculer une dose adéquate d’insuline en fonction d’une glycémie mesurée à un instant t…

Une solution numérique ne remplit pas ces critères si elle permet uniquement de :

  • S’assurer de la bonne prise d’un traitement ;
  • Stocker, archiver ou rechercher des données dans une bibliothèque numérique sans les exploiter ;
  • Communiquer des données sans déclencher d’alertes auprès d’un médecin ;
  • Faciliter la pratique d’une activité physique ou d’améliorer le confort du patient.

A noter 

  • Un logiciel ou une application qui pilote ou influence l’utilisation d’un DM sera considéré(e) comme un dispositif médical au même titre que le DM avec lequel il ou elle est utilisé(e) en combinaison. 

Pour aller plus loin

Consulter la fiche du Snitem : https://www.snitem.fr/wp-content/uploads/2020/01/AOUT-2021-DM-ou-pas-DM.pdf

Source : ANSM.

https://ansm.sante.fr/documents/reference/reglementation-relative-aux-dispositifs-medicaux-dm-et-aux-dispositifs-medicaux-de-diagnostic-in-vitro-dmdiv/logiciels-et-applications-mobiles-en-sante.

 

EnjeuxEnjeux

Hela-ghariani

Hela Ghariani, déléguée ministérielle au numérique en santé (DNS) par intérim (DNS) du ministère de la Santé, rappelle le cadre du rôle de la délégation dans le développement des dispositifs médicaux numériques.

« Nous avons la conviction que les dispositifs médicaux numériques sont une partie de la solution pour garantir la pérennité de notre système de santé.

Les dispositifs médicaux numériques peuvent apporter beaucoup de valeur aux patients, aux professionnels et au système de santé de manière générale. Cette valeur, il faut être en capacité de la mesurer et de définir les conditions d’accès au marché et de déploiement qui vont permettre d’en maximiser l’impact.

Ce qui nous importe en premier lieu, c’est donc l’évaluation de leur bénéfice clinique ou médico-économique au niveau national mais également l’harmonisation de ces méthodologies d’évaluation à l’échelle européenne pour, notamment, faciliter leur accès au marché et leur déploiement.

Pour accompagner le développement des DM numériques, nous essayons donc de faire émerger des méthodologies et des processus d’évaluation qui soient les plus normés possibles pour renforcer l’intégration de ces produits dans le système de soin français. Nous finançons dans le cadre de la stratégie d’accélération santé numérique, la réalisation d’évaluations cliniques pour démontrer la valeur des DM numériques qui émergent et pour favoriser la définition de protocoles d’évaluation adaptés aux enjeux numériques.

Et en tant que régulateur, notre rôle est de définir les normes et les règles auxquelles ces solutions doivent être conformes, au-delà de leur conformité réglementaire au marquage CE médical, pour apporter un certain nombre de garanties à chaque utilisateur et à la société en général.

Il faut prévoir l’intégration de ces DM numériques avec le reste des systèmes d’information en santé, notamment du point de vue de leur interopérabilité et de leur sécurité pour garantir la protection des données de santé des Français.

Enfin et surtout, nous sommes attentifs aux questions d’éthique, ces solutions doivent respecter le cadre de valeurs qui est celui de notre système de santé et de notre société : déontologie, non-discrimination, transparence, qualité et sobriété écologique.

Fiche récapFiche récap

La télésanté : pour quoi faire et avec quoi ?

Depuis le décret du 3 juin 2021 et l’arrêté définissant les activités de télésoin publié dans la foulée, la télésanté désigne officiellement l’ensemble des activités exercées entre des professionnels de santé et leurs patients grâce au numérique.
Cette « nouvelle manière de soigner » reste soumise aux exigences de qualité et de sécurité des soins des professionnels de santé.
La télésanté regroupe à la fois le télésoin et la télémédecine, laquelle comprend 5 types d’actes : la télésurveillance, la téléconsultation, la téléexpertise, la téléassistance et la régulation médicale.

Le télésoin

C’est quoi ?
Prise en charge et suivi à distance d’un patient par un auxiliaire médical ou un pharmacien (18 professionnels de santé autorisés : audioprothésistes, diététiciens, épithésistes, ergothérapeutes, infirmiers, manipulateurs d’électroradiologie, masseurskinésithérapeutes, ocularistes, opticiens-lunetiers, orthopédistes-orthésistes, orthoprothésistes, orthophonistes, orthoptistes, pédicures-podologues, pharmaciens, podo-orthésistes, psychomotriciens, techniciens de laboratoire médical).

Pour qui ?
Pour tous les patients, par décision partagée avec le professionnel lorsque celui-ci évalue
le télésoin adapté.

Pour quoi ?
Pour les actes ne nécessitant pas de contact direct et/ou un équipement spécifique non disponible auprès du patient.

La télémédecine

C’est quoi ?
Activités réalisées à distance par un professionnel médical (médecin, sage-femme,
chirurgien-dentiste).

Pour quoi ?
5 types d’actes : la télésurveillance, la téléconsultation, la téléexpertise, la téléassistance
et la régulation médicale.

Avec quoi ?
Des outils numériques conformes aux différents cadres juridiques et réglementaires applicables aux données de santé.

La télémédecine dans le détail

La télésurveillance

C’est quoi ?
Prise en charge à distance du patient permettant à un professionnel médical d’interpréter des données recueillies sur le lieu de vie du patient grâce à l’utilisation d’un dispositif médical numérique.

Pour qui ?
Pour tout patient dont la prise en charge nécessite une période de suivi médical, par exemple dans
le cadre d’une pathologie chronique.

Exemples de DM/outils
Dispositif de pression positive continue pour les apnées du sommeil, prothèse rythmique connectée
pour l’insuffisance cardiaque, pompe à insuline connectée pour le diabète…

La téléconsultation

C’est quoi ?
Consultation à distance entre un professionnel
médical et son patient, celui-ci pouvant
être assisté d’un professionnel de santé
(pharmacien, infirmier…) ou d’un proche.

Pour qui ?
Pour tous les patients, quel que soit leur âge,
leur pathologie ou leur lieu de résidence. Le
professionnel médical évalue la pertinence
du recours à la téléconsultation et le patient
doit donner son consentement.

La téléexpertise

C’est quoi ?
Sollicitation à distance par un professionnel
de santé d’un ou plusieurs professionnels
de santé médicaux face à une situation
médicale, hors présence du patient.

Pour qui ?
Pour tous les patients. Ils doivent néanmoins
avoir été informés des conditions de
réalisation de l’acte et avoir donné leur
consentement.

La téléassistance

C’est quoi ?
Réalisation d’un acte par un auxiliaire
médical assistant un professionnel médical
situé à distance.

Pour qui ?
Pour tous les patients. Ils doivent néanmoins
avoir été informés des conditions de
réalisation de l’acte et avoir donné leur
consentement.

La régulation médicale

C’est quoi ?
Apport à distance d’une réponse médicale et
orientation du patient dans son parcours de
soins ?

Pour qui ?
Pour les patients contactant les Samucentres
15.

La télésurveillance et le programme ETAPES

La télésurveillance a fait l’objet d’une expérimentation intitulée ETAPES permettant sa prise en charge dérogatoire dans 5 pathologies : diabète, insuffisance cardiaque, insuffisance rénale, insuffisance respiratoire et prothèses cardiaques.
Ce programme arrive à son terme en 2022 avec l’entrée de la prise en charge de la télésurveillance dans le droit commun, initialement le 1er juillet dernier. Un calendrier qui a été décalé, entraînant « une prise en charge de transition entre ETAPES et le droit commun » pour les patients déjà inclus comme pour les nouveaux patients, « sans que soit requis le dépôt d’une demande d’inscription, par les exploitants concernés, au cours du mois de juillet tel que prévu par la loi ».
L’objectif ? Éviter toute rupture de prise en charge ou perte de chance pour les patients.