Le dispositif médical : démêler le vrai du faux

1 Vrai/Faux : le marquage CE médical qui encadre la mise sur le marché des implants est un simple label ! Le marquage CE est le même que ce soit pour un implant ou un jouet.

Faux : les règles et exigences qui concernent le marquage CE dit médical et qui encadrent la mise sur le marché des dispositifs médicaux sont strictes et rigoureuses. Elles sont spécifiques à ces produits de santé. Elles diffèrent de celles applicables au marquage CE d’autres produits de consommation courante comme les réfrigérateurs ou les jouets.

Ces règles et exigences permettent d’assurer que :

  • les dispositifs médicaux sont conçus et ensuite fabriqués pour assurer un bénéfice thérapeutique ou diagnostique aux patients ;
  • les risques résiduels (il y en a et il y en aura toujours pour un produit de santé) associés restent acceptables au regard de ce bénéfice.

La détermination du rapport bénéfice/risque est un élément fondamental dans le cadre du marquage CE médical. Sa démonstration s’appuie essentiellement sur deux éléments majeurs :

  • l’évaluation clinique du dispositif médical ;
  • l’analyse de gestion des risques de son utilisation.
2 Vrai/Faux : un implant est toujours associé à un bénéfice médical mais aussi à un risque.

Vrai : lorsqu’un produit de santé est utilisé ou qu’un acte médical est réalisé chez un patient, il est évidemment attendu qu’un bénéfice clinique en soit la résultante. Dans le cas de l’utilisation des implants, le bénéfice attendu est en général important en termes de fonctionnalité et il arrive que le pronostic vital soit engagé.

Tout acte médical ou utilisation de produits de santé comporte par ailleurs des risques. En ce qui concerne les implants, les risques sont d’une part, liés au dispositif lui-même et d’autre part, au geste chirurgical qui peut, de plus, imposer une anesthésie elle-même comportant ses propres risques.

Par ailleurs, certains risques peuvent survenir au bout de plusieurs années d’implantation. Ces risques ne peuvent pas toujours être évalués dans le cadre des essais cliniques pré-marquage CE. Le risque éventuel non défini a priori est à mettre en regard avec la perte de chance pour les patients de ne pas être pris en charge avec l’implant considéré. C’est particulièrement vrai quand les alternatives sont limitées ou absentes et le pronostic vital est engagé. Pour ce type de situation, le suivi clinique post-commercialisation prend toute sa valeur permettant de récolter des données essentielles.

Cette balance bénéfice/risque doit donc être regardée au niveau de l’implant, du geste chirurgical et des actes médicaux liés. Il s’agit aussi de tenir compte des alternatives disponibles, de leur propre balance bénéfice/risque ou de l’absence d’alternative.

Le développement d’un produit et la démonstration de son bénéfice/risque se fera à un niveau populationnel (conception pour atteindre un bénéfice clinique reproductif, réduction des risques au minimum, information sur les risques résiduels) pour des indications définies. La prise en charge d’un patient par un professionnel de santé se concentrera sur la balance bénéfice/risque individuelle pour ce patient, tenant compte des différentes alternatives thérapeutiques (ou l’absence d’alternative).

Il est de la responsabilité du fabricant de définir les risques résiduels liés à l’utilisation de son dispositif et de la responsabilité du professionnel de santé d’informer le patient des risques liés au choix thérapeutique qui aura été fait au regard de sa situation clinique personnelle, des risques liés à l’implant considéré et de ceux des éventuelles alternatives.

3 Vrai/Faux : les fabricants participent à la formation des professionnels de santé.

Vrai : les implants sont liés à un acte exécuté par un professionnel de santé. Un des critères de la bonne utilisation de ces dispositifs implantables est donc lié à son caractère dit « opérateur dépendant ». Les exigences réglementaires, qui prévalent pour la mise sur le marché sur le territoire européen enjoignent, compte tenu du caractère opérateur dépendant, que la formation des utilisateurs soit assurée par les fabricants lorsque nécessaire afin d’assurer la bonne utilisation en tout sécurité des DM concernés.

4 Vrai/Faux : l’industrie du dispositif médical n’est pas régulée.

Faux : l’industrie du DM répond à plusieurs réglementations spécifiques et adaptées à ces produits de santé. Le Code de la santé publique leur dédie un livre spécifique (cf. deuxième livre de la cinquième partie du code de la santé publique) qui notamment transpose la réglementation européenne du marquage CE médical. Depuis 1998, l’ensemble des dispositifs médicaux est soumis à une réglementation européenne en vue de leur mise sur le marché. Elle a déjà connu plusieurs modifications dont la dernière en date est l’adoption en mai 2017 du règlement européen sur les dispositifs médicaux.

5 Vrai/Faux : les dispositifs médicaux, dont les implants, n’ont pas besoin d’une autorisation de mise sur le marché pour être commercialisés.

Vrai : au strict sens du terme autorisation. Pour autant, pour être commercialisés en Europe, les dispositifs médicaux doivent être conformes aux exigences de sécurité et de performances cliniques définies par la réglementation européenne (directive 93/42 qui va être remplacée à partir de mai 2021 par le règlement 2017/745). La conformité à cette réglementation est matérialisée par l’apposition du marquage CE médical.

Après avoir effectué l’ensemble des démarches permettant de démontrer la conformité de son produit à la réglementation, qui pour les dispositifs implantables inclut l’obtention de certificats de conformité (cf. questions 4 et 6) par un organisme notifié, le fabricant établit une déclaration de conformité et appose le logo CE sur ses implants. Ceux-ci peuvent alors conformément à la réglementation européenne circuler librement sur le territoire Européen.

  • Dans certains pays comme la France, le fabricant doit informer l’autorité compétente (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé – ANSM en France) de la première mise sur le marché de son dispositif. Cette information permet alors à l’autorité compétente de savoir quels dispositifs implantables sont en circulation sur son territoire et de les surveiller à travers ses activités de vigilance, de contrôle et d’inspection.

Le règlement 2017/745 prévoit la communication des informations relatives aux fabricants, mandataires et distributeurs (opérateurs économiques) et des dispositifs médicaux dans une base européenne centralisée : Eudamed.

6 Vrai/Faux : les implants ne sont pas évalués avant leur commercialisation.

Faux : pour démontrer la conformité de ses dispositifs médicaux aux exigences réglementaires, le fabricant s’appuie sur deux axes :

  • la constitution de sa documentation technique (par dispositif médical) : cette documentation regroupe l’ensemble des éléments d’évaluation du produit en lui-même (notamment étapes de validation du processus de conception, conformité aux normes et référentiels applicables au regard de l’état de l’art, évaluation pré-clinique, évaluation clinique, validation des processus de production). C’est au sein de cette documentation que sont colligés les résultats des tests pré-cliniques, le rapport d’évaluation clinique et la réponse point par point aux différentes exigences de sécurité et de performances cliniques applicables au produit ;
  • son système de management de la qualité (SMQ) : c’est ce qui permet au fabricant de démontrer sa capacité à reproduire le dispositif médical dans le temps, pour tous les lots de produits, en conformité avec les exigences essentielles. Ce système inclut notamment la gestion des modifications du produit, la gestion des risques, la maîtrise de la sous-traitance, l’organisation de la surveillance post-marché …

Les organismes notifiés (ON) évaluent systématiquement, de manière indépendante, la documentation technique de l’implant du fabricant et auditent son SMQ sur ses différents sites ainsi que ceux de ses sous-traitants critiques. Si ces évaluations satisfont aux exigences, l’organisme notifié leur délivre alors un certificat de marquage CE médical valide pour une durée limitée à 5 ans au maximum.

Il n’est donc pas possible d’obtenir une certification d’un implant sur un simple dossier descriptif et technique en particulier sans une évaluation clinique pertinente.

7 Vrai/Faux : les organismes notifiés sont indépendants dans leurs contrôles et décisions.

Vrai : les organismes notifiés (ON) sont des organisations qui sont soumises à des règles précises d’habilitation et d’exercice. Ce sont les autorités compétentes (en France, l’ANSM) qui habilitent, surveillent et renouvellent ces organismes dans un processus impliquant la Commission Européenne et d’autres autorités compétentes sur la base de plusieurs critères en particulier l’impartialité et l’indépendance. Les ON ont donc l’obligation de démontrer qu’ils ont mis en place les règles et processus permettant d’assurer leur impartialité et indépendance.

Les tarifs des prestations de certification délivrées par les ON sont basés sur les évaluations réalisées (audits, évaluations de la documentation technique, évaluation des plans d’actions correctives, processus de certification) et non sur les décisions rendues.

8 Vrai/Faux : il est possible d’obtenir une certification d’un implant permettant de le mettre sur le marché sans évaluation préalable.

Faux : l’obtention de la certification d’un implant est strictement encadrée et n’est émise par l’organisme notifié qu’à l’issue du processus complet suivant :

  • évaluation : audit(s) sur site, évaluation(s) de la documentation technique. Les modalités précises de ces évaluations en matière de durée, périodicité et de sites à auditer dépendent de la taille de l’entreprise, du nombre et des catégories des implants, de l’existence de sous-traitants critiques … ;
  • revue des résultats de ces évaluations pour contrôler la démonstration de conformité mise en œuvre par le fabricant ;
  • décision de certification.

L’évaluation par l’organisme notifié (ON) est donc incontournable pour un implant. Le seul moyen pour fournir un certificat sans évaluation préalable est la fraude.

9 Vrai/Faux : les implants ne sont pas contrôlés une fois mis sur le marché, c’est-à-dire après obtention du marquage CE médical.

Faux : il existe de fait trois niveaux de contrôle une fois les implants mis sur le marché :

  • celui que doivent réaliser le fabricant et l’organisme notifié (ON) sur la durée de validité de la certification,
  • celui des utilisateurs,
  • et celui de l’autorité compétente (en France, l’ANSM, Agence de sécurité sanitaire des médicaments et des produits de santé).

1- Les fabricants ont l’obligation de mettre en place un système de surveillance après commercialisation leur permettant de collecter de façon proactive les données pertinentes sur la qualité, les performances et la sécurité d’un dispositif pendant toute sa durée de vie, afin de définir et d’appliquer toute mesure préventive ou corrective et d’en assurer le suivi.

Ils doivent également mettre en place un processus réactif de traitement des incidents graves mettant en cause les dispositifs médicaux (matériovigilance) afin notamment de les signaler immédiatement aux autorités compétentes (en France, l’ANSM) et de conduire les actions correctives permettant d’éviter à nouveau la survenue du même type d’incident.

Pendant la durée de validité du certificat émis par l’organisme notifié (ON), celui-ci vérifie par des audits au moins annuels systématiques sur sites, que les exigences réglementaires continuent à être remplies et que les procédures de surveillance après commercialisation (y compris le système de vigilance) mises en place par le fabricant sont efficaces. L’ON peut aussi programmer des audits supplémentaires ou inopinés pour suivre des situations particulières de mise en place d’actions correctives. Pour le renouvellement des certificats, ainsi qu’en cas de modification substantielle du dispositif implantable, un contrôle approfondi de la documentation technique et du système de management de la qualité est réalisé par l’ON.

2- Dans la pratique, un dispositif implantable nécessite l’intervention d’un professionnel de santé exerçant dans un établissement de soins. Les implants sont référencés dans l’établissement à travers une procédure d’achat qui demande à la fois des échantillons et les éléments de conformité réglementaire (déclaration de conformité du fabricant, certificats de conformité CE de l’organisme notifié, notice, étiquetage…). Sont impliqués dans l’approvisionnement des implants au sein de l’établissement, les professionnels de santé utilisateurs et poseurs, le pharmacien hospitalier responsable de la gestion, de l’approvisionnement, de la dispensation des dispositifs médicaux stériles et le cas échéant l’ingénieur biomédical. Les professionnels de santé utilisateurs vérifient enfin l’adéquation entre le cas clinique présenté par le patient et les indications et conditions d’utilisation de l’implant concerné.

3- Le troisième niveau de contrôle est assuré par les autorités compétentes en matière de surveillance du marché et de police sanitaire (en France, l’ANSM et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – DGCCRF) qui remplissent leurs missions en mettant en œuvre des inspections, des contrôles (documentaire ou en laboratoire) et en organisant le système de matériovigilance (cf. point 8).

10 Vrai/Faux : les fabricants ne tiennent pas compte des incidents rapportés sur leurs implants.

Faux : les fabricants ont des obligations strictes de matériovigilance en matière de signalement des incidents graves.

Leur système de management de la qualité (SMQ), qui est audité chaque année par l’organisme notifié (ON), doit contenir les procédures de traitement des informations et réclamations reçues, de leurs analyses et de leurs signalements aux autorités compétentes.

Ils doivent donc instaurer un processus de traitement des incidents graves mettant en cause les dispositifs médicaux (matériovigilance), afin notamment de les signaler immédiatement aux autorités compétentes (en France, l’ANSM) et de mettre en place les mesures de sécurité pour les patients implantés et les actions correctives permettant d’éviter à nouveau la survenue du même type d’incident.

L’analyse par les fabricants des incidents de vigilance est un exercice minutieux. Il dépend de la qualité de l’information remontée, afin de déterminer le rôle (l’imputabilité) de l’implant dans l’incident et de faire la part des choses entre le geste chirurgical, l’état de santé du patient, l’implant que ce soit dans sa conception, sa fabrication ou les conditions dans lesquelles il a été utilisé. Seule une analyse approfondie permet de prendre les mesures appropriées et proportionnées pour les patients déjà implantés et les actions correctives pertinentes sur l’implant en lien avec l’autorité compétente.

11 Vrai/Faux : les fabricants dépendent des professionnels de santé pour exercer leurs obligations en matière de vigilance concernant les implants.

Vrai : au-delà des fabricants, les utilisateurs ou plus généralement toute personne ayant connaissance d’un incident grave ou d’un risque d’incident grave doivent conformément à la loi faire un signalement à l’autorité compétente (en France, l’ANSM).

L’autorité compétente transmet alors au fabricant la déclaration pour analyse et mise en place des mesures de sécurité et actions correctives. Sans cette remontée d’information les fabricants ne peuvent que partiellement exercer leurs obligations de vigilance. Aujourd’hui ces signalements de la part des professionnels de santé restent encore sous-déclarés.

12 Vrai/Faux : le nombre d’incidents progresse chaque année.

Vrai : L’allongement de l’espérance de vie conduit à une augmentation de l’activité médicale. Le nombre de prothèses implantées est donc en croissance ; ce facteur est à prendre en compte au regard de l’évolution des solutions médicales et des modes de prise en charge.

Les obligations en matière de déclaration d’incident ou de risque d’incident sont mieux suivies par les professionnels de santé. En effet, même si cela demeure encore insuffisant, la sensibilisation des établissements et professionnels de santé mise en place ces dernières années commence à porter ses fruits. Cette sensibilisation à la nécessité de signalement par les professionnels de santé est d’autant plus importante que le résultat médical final est une combinaison étroite entre le geste du chirurgien et la performance clinique du dispositif médical.

13 Vrai/Faux : les industriels ne tracent pas leurs produits.

Faux : les industriels ont l’obligation de porter sur l’étiquetage du dispositif médical les indications permettant de l’identifier, dont le numéro de lot ou le numéro de série. Leur système de management de la qualité (SMQ) doit prévoir les procédures de traçabilité (en incluant dans le circuit leurs distributeurs) qui permettront, en cas de rappel de produit, d’informer tous les établissements susceptibles d’avoir utilisé un des dispositifs médicaux concernés.

Ainsi les fabricants ont mis en place au sein de leur organisation des systèmes d’information qui leur permettent de savoir à qui ils ont vendu leurs implants au numéro de série ou de lot près.

14 Vrai/Faux : les établissements de santé sont tenus de conserver la traçabilité des implants posés chez chaque patient.

Vrai : les établissements sont tenus en ce qui les concerne de conserver la traçabilité des implants utilisés pour chaque patient dans leur système et de remettre ces informations au patient.

Ainsi grâce aux processus de traçabilité mis en place à la fois par les fabricants et les établissements de santé, lors de rappels de dispositifs médicaux ou de mesures particulières de suivi à mettre en œuvre, les patients sont contactés par l’établissement de santé.



Dernière mise à jour : 25/05/2021
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