Livret pathologies veino-lymphatiques

Des égyptiens au néolithique jusqu'au wrap et à la compression pneumatique intermittente, la prise en charge des pathologies d'insuffisance veineuse et lymphatique a évolué de manière spectaculaire.

Un véritable enjeu de santé publique

Dr Christine Jurus Médecin vasculaire, Présidente de la Société française de médecine vasculaire.

Les pathologies d’insuffisance veineuse chronique, comme lymphatique, restent des affections chroniques, évolutives, pour lesquelles nous ne disposons pas, à l’heure actuelle, de traitement étiologique curatif radical. Les traitements restent donc symptomatiques, fonctionnels, visant à soulager les symptômes des patients et à éviter les complications. Grâce aux progrès technologiques, que ce soit au sein du bloc opératoire, avec le développement des traitements endoveineux, mais également au quotidien avec l’évolution des dispositifs de compression médicale, beaucoup plus confortables et esthétiques, la vie des patients s’en trouve grandement améliorée ; il ne faut pas omettre le caractère global de la prise en charge, associant outre les traitements médicaux et chirurgicaux, les règles classiques d’hygiène veineuse, nécessaires au long cours.

Ces dernières décennies ont été fondamentales pour la prise en charge des pathologies veino-lymphatiques et de l’insuffisance veineuse chronique qui touchent quelque 12 millions de personnes en France. La prise en charge diagnostique et thérapeutique de ces pathologies représente donc un véritable enjeu de santé publique.

Sur un plan thérapeutique, la prise en charge des varices s’est beaucoup simplifiée grâce au développement de traitements endoveineux. De vastes avancées ont été menées afin de rendre les traitements moins agressifs et moins lourds pour les patients et de leur faire gagner en confort. Grâce aux progrès technologiques et à la miniaturisation des dispositifs, nous avons beaucoup progressé et les gestes médicaux et chirurgicaux comme les suites des traitements sont désormais beaucoup plus simples et légers. Les techniques se sont en outre diversifiées et se diversifient encore, de sorte que l’arsenal thérapeutique en médecine vasculaire est aujourd’hui très étendu. Dans le domaine de la compression, d’énormes progrès ont également été obtenus ces dernières années. Des prouesses techniques ont en effet été réalisées dans l’industrie du textile, permettant d’avoir à disposition, aujourd’hui, des gammes complètes, confortables et variées d’orthèses de compression. De fait, la pose des dispositifs s’en est également trouvée facilitée. Ces progrès réalisés sur les matériaux ont permis, par ricochet, d’améliorer la tolérance et, donc, l’observance pour le port de ces dispositifs, facteurs qui se positionnent comme des thérapeutiques complémentaires essentielles pour ces pathologies.

A cela s’ajoutent d’importants efforts relatifs à l’aspect esthétique de ces dispositifs. Souhaitons que les progrès techniques se poursuivent de façon aussi rapide et constructive que ces dernières années afin de pouvoir optimiser la prise en charge thérapeutique de façon simple, efficace et surtout sans effet secondaire ni danger pour les patients.

Des progrès impressionnants déjà réalisés et des bouleversements encore à venir

Dr Claudine Hamel-Desnos, Présidente de la Société française de phlébologie.

Il est des domaines de la médecine où les progrès ont été très impressionnants ces dernières années, la phlébologie en fait partie. Rien que pour les varices, ces progrès sont susceptibles de concerner 20 à 35 % de la population générale de notre pays. C’est dire leur impact potentiel sur la qualité de vie des français. Cet ouvrage du Snitem est donc une initiative particulièrement bienvenue que nous saluons. Avec une pertinence certaine et des précisions historiques intéressantes, il fait le point sur les innovations technologiques concernant les affections veineuses chroniques et lymphatiques, et sur leur avenir.  Ce document est surtout ciblé sur la prise en charge thérapeutique. Il est cependant important de rappeler, en préambule, qu’une grande partie des avancées phlébologiques n’aurait pas été possible sans les progrès des explorations, de l’imagerie, avec en premier lieu l’écho-Doppler. Historiquement, ce simple appareil d’ultrasons et quelques utilisateurs experts, ont en effet permis une amélioration considérable des connaissances anatomiques, hémodynamiques et physiopathologiques de la veine et ses dysfonctionnements. Les données obtenues ont bouleversé l’approche thérapeutique de la prise en charge des affections veineuses, aussi bien profondes que superficielles, et continuent encore de nos jours à la faire progresser.

Signalons également que l’écho-Doppler et une maîtrise parfaite de son utilisation sont essentiels dans la réalisation quotidienne d’un certain nombre d’actes diagnostiques et thérapeutiques phlébologiques. En imagerie ultrasonore moderne, l’IVUS (IntraVascular UltraSound) commence à se développer mais son utilisation reste malgré tout restreinte. Il est encore difficile de préjuger de la place qu’il occupera à l’avenir, d’une part en raison de son coût et, d’autre part, en raison des indications encore mal cernées.

Dans la prise en charge des affections veineuses superficielles, ce livret Snitem apporte un éclairage essentiel sur les techniques endoveineuses dans le traitement des veines saphènes et démontre le bénéfice considérable que celles-ci apportent au patient versus chirurgie classique. Laser et radiofréquence constituent effectivement des avancées majeures dans l’arsenal thérapeutique concernant cette indication, et la vapeur devra trouver sa place. Cependant, le futur est probablement dans des techniques NTNT, peut-être celles déjà existantes ou d’autres à venir.

Par techniques endoveineuses NTNT il faut entendre « non thermal non tumescent ». Des dispositifs sont à l’étude mais, à l’heure actuelle, peuvent être considérés comme des techniques NTNT disponibles sur le marché, le MOCA (Mechanochemical endovenous ablation) et la colle biologique. Le MOCA est une technique combinée consistant en un dispositif mécanique rotatif irritant l’endoveine et l’injection de sclérosant liquide. Le LAFOS (Laser assisted foam sclerotherapy) est lui une technique frontière puisqu’elle est thermique, utilisant un laser Holmium mais ne dégageant volontairement qu’une chaleur au maximale de 60 degrés. C’est aussi une technique combinée car elle comporte une injection de mousse sclérosante.

L’objectif idéal des recherches serait de tendre vers des techniques d’ablation plus polyvalentes, de moins en moins agressives, avec des temps opératoires réduits et un environnement léger (simple salle de soins). Reste que la recherche et le développement coûtent cher et que l’arrivée sur le marché de nouveaux dispositifs onéreux est à chaque fois problématique pour leur utilisation à grande échelle. La sclérothérapie à la mousse réunit, quant à elle, tous les critères requis. C’est en effet une technique NTNT, ne nécessitant aucune anesthésie, peu agressive, rapide, d’un très faible coût et réalisée en cabinet.

On lui reprochera son efficacité inférieure en termes d’occlusion persistante sur les veines saphènes, comparée aux techniques thermiques. Elle reste néanmoins la technique la plus largement utilisée pour l’ensemble des indications de traitement des varices car elle est très polyvalente et ne se réduit pas au seul traitement des veines saphènes.

Concernant le réseau veineux profond, on peut s’attendre aussi, dans les années à venir, à de grands bouleversements dans la prise en charge des obstructions et reflux, par le biais de l’interventionnel endoveineux.  Ce livret fait également une large place à la compression dans l’insuffisance veineuse chronique et le lymphœdème, y compris du membre supérieur. Insérant des rappels historiques, les chapitres abordent le développement de diverses innovations technologiques dont le wrap. Nous ne pouvons qu’approuver et encourager les efforts effectués par les industriels pour améliorer l’observance des patients car, bien sûr, là est la clé du succès de toute thérapeutique compressive.

Face à l’immense potentiel de développement et au regard de l’énergie, du dynamisme et de la détermination dont font preuve aussi bien les professionnels de santé que les industriels, qui travaillent en toute synergie, gageons que ce livret pourra être mis à jour dans une dizaine d’années, avec au moins autant d’innovations surprenantes et riches, pour le plus grand bénéfice des patients.

Sensation de jambes lourdes, crampes nocturnes, prurit et paresthésies : tels sont les principaux symptômes de l’insuffisance veineuse chronique. Des symptômes gênants mais qui ne sont pas toujours alarmants pour le patient. Pourtant, si l’insuffisance veineuse chronique n’est pas traitée, elle peut évoluer vers l’apparition de varices et de complications liées à ces varices : troubles trophiques de la peau et des tissus sous cutanés ou ulcères de jambes. Des complications aiguës peuvent également survenir : thrombose veineuse superficielle (phlébite superficielle ou paraphlébite), plus rarement thrombose veineuse profonde (phlébite profonde), rupture de varices.

Or, ces pathologies concernent une part importante de la population. En 1996, l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) estimait que plus de 12 millions de personnes en France avaient des varices, soit 20 à 35 % de la population. Ce chiffre n’a pas été actualisé depuis mais est largement repris par les professionnels de santé. Selon la Société française de phlébologie, parmi la population présentant des varices, deux tiers sont des femmes et un tiers des hommes. En ce qui concerne les ulcères de jambes, 93 % d’entre eux sont d’origine veineuse. La prévalence des ulcères de jambes est de 0,63 % de l’ensemble de la population mais il atteint 2 % au‐delà de 80 ans. Selon le Conseil national professionnel de médecine vasculaire qui dresse un état des lieux dans son Livre blanc de 2015, on recense « environ 160 000 thromboses veineuses profondes, et autant de thromboses veineuses superficielles et plus de 12 000 embolies pulmonaires (EP) mortelles chaque année », l’embolie pulmonaire survenant si le thrombus migre jusqu’à l’artère pulmonaire et l’obstrue.

L’insuffisance veineuse chronique représente par conséquent un véritable enjeu de santé publique même s’il semble encore trop méconnu, notamment des patients. Son traitement est essentiel. Il est d’ailleurs connu depuis des millénaires : la contention. De fait, les bandes de contention existent depuis le Néolithique ! Pour autant, au fil des siècles, la contention a évolué. Après les bandes, les bas ont fait leur apparition au Moyen-Age, fabriqués notamment en peau. Il faut cependant attendre l’invention du caoutchouc au XIXe siècle pour que la contention connaisse une véritable révolution. Avec les fils élastiques, les bandes et les bas deviennent compressifs. Depuis cette époque, on pourrait penser que les traitements par compression ont connu peu d’innovations de rupture. Pourtant, les fabricants des dispositifs de compression médicale n’ont pas cessé de travailler à les rendre plus efficaces et plus confortables. Car l’observance est la clé de la réussite du traitement de l’insuffisance veineuse chronique. Permettre aux patients de supporter la compression durant des années est l’un des défis auxquels doivent répondre les professionnels de santé et les industriels. C’est ainsi que les bandes multitypes et les « wrap » (bandes ajustables) ont fait leur apparition ainsi que l’étalonnage et les attaches auto-agrippantes. L’objectif ? Faciliter la mise en place des bandes tout en assurant la bonne pression. Les « bas de grand-mère », épais, inconfortables, chauds l’été, ont acquis finesse et légèreté grâce à des nouveaux matériaux (élasthanne et microfibres) et des nouvelles techniques de tricotage. Leurs couleurs et leurs motifs en font aujourd’hui des dispositifs facilitant l’observance. Toutes ces améliorations, souvent peu perçues par le grand public et les professionnels de santé non spécialisés, constituent autant d’avancées pour favoriser l’observance et faciliter la vie quotidienne des patients atteints d’insuffisance veineuse chronique ou d’ulcères veineux.

Améliorer la vie des patients est également l’un des objectifs des traitements endoveineux et sclérosant des varices. Si la chirurgie des varices (ou stripping) existe depuis l’époque romaine, ces traitements plus récents, moins invasifs, permettent de réduire la durée des interventions et de la période post-opératoire. Les techniques endovasculaires du laser, de la radiofréquence ou de la vapeur d’eau sont ainsi pratiquées en ambulatoire et permettent une reprise rapide de l’activité. Il en est de même avec la sclérothérapie qui est aussi réalisée en cabinet. L’utilisation de coils pour l’embolisation des veines ou celle de stents (voir les chapitres consacrés) pour rétablir la circulation du sang en rétablissant le diamètre des veines sont aussi des exemples de techniques endoveineuses, moins invasives que la chirurgie. Ces traitements alternatifs à la chirurgie montrent le dynamisme de la phlébologie, lequel ne s’est jamais démenti tout au long des siècles. Ainsi, l’embolisation des varices par la vapeur d’eau date seulement de 2007. Avec l’arrivée des nanofibres et de la santé connectée, de nouvelles possibilités s’ouvrent certainement dans le domaine des bandes et des bas de compression. Les techniques de laser et de radiofréquence continuent aussi d’évoluer. Le retrait motorisé des sondes est un axe de travail. A chaque fois, le même principe guide les médecins et les industriels : accroître la sécurité des techniques et réduire les effets secondaires post-opératoires. L’idée est également d’assurer des résultats durables en diminuant les récidives pour le bénéfice des patients.

Les innovations du traitement du lymphœdème

Chaque année, en France, on observe 53 000 nouveaux cas de cancer du sein avec 7 % de lymphœdème si le ganglion sentinelle est retiré et environ 28 % de lymphœdème suite au curage axillaire. Il s’agit de lymphœdèmes secondaires. Concernant les lymphœdèmes primaires, la prévalence est estimée à 1/10 000 avant l’âge de 20 ans. Les traitements compressifs des lymphœdèmes ont aussi connu des évolutions marquantes. On peut notamment citer le « wrap » et les vêtements mobilisateurs, ces derniers permettant d’appliquer une pression différenciée. A l’instar de l’insuffisance veineuse chronique, les améliorations des dispositifs visent à favoriser l’observance par l’autonomisation des patients.

La pression est utilisée depuis des siècles pour traiter les pathologies veineuses et vasculaires des membres inférieurs. Les chaussettes, bas et collants de compression médicale sont indiqués pour le traitement de l’insuffisance veineuse et de la thrombose veineuse.

L’appellation de bas de compression médicale recouvre également les chaussettes et les collants. Ces dispositifs médicaux permettent de traiter l’insuffisance veineuse chronique, c’est-à-dire les varices. Ils font également partie du traitement de la thrombose veineuse. L’insuffisance veineuse superficielle est due à un reflux du sang dans une partie ou la totalité d’une veine superficielle. Le sang des membres inférieurs, appauvri en oxygène, ne parvient pas à remonter vers le cœur pour être réoxygéné. Ce reflux entraîne une stagnation du sang. L’insuffisance veineuse superficielle se manifeste généralement par l’apparition de varices qui sont des dilations irrégulières des veines superficielles. « Il ne s’agit pas d’un vieillissement des veines, mais d’une maladie d’origine génétique », précise le Dr Didier Rastel, médecin vasculaire, membre titulaire de la Société française de phlébologie et de la Société française de médecine vasculaire. Un œdème et des affections cutanées (dermites, hypodermites, ulcères) sont des signes d’aggravation de la pathologie. Les varices représentent aussi un risque accru de thrombose veineuse. Il s’agit d’un caillot qui obstrue partiellement ou totalement une ou plusieurs veines. En France, environ 18 millions de personnes souffrent d’insuffisance veineuse.

Les bas de compression peuvent également être prescrits après un traitement chirurgical ou une sclérothérapie des varices. Ils participent aussi au traitement de prévention des récidives des ulcères veineux et de la maladie thrombo-embolique veineuse à destination des patients à risque (grossesse, chirurgie...). Les bas de compression sont également un recours dans le traitement du lymphœdème des membres inférieurs.

En exerçant une pression mécanique extérieure sur les membres inférieurs (chevilles et jambes), les bas de compression médicale réduisent l’hypertension veineuse et la dilatation des veines et améliorent la remontée du sang vers le haut du corps. Ils réduisent et contiennent un œdème veineux grâce à leur structure et leurs dimensions spécifiques. Pour assurer la compression, ils sont tricotés à base de fils élastiques. Si l’on tire sur le tricot de manière longitudinale, la maille se déforme et assure une extensibilité en longueur. Si l’on tire de manière transversale, la trame s’allonge et développe une force. La pression exercée par le dispositif de compression est mesurée en millimètres de mercure (mmHg). En France, les bas de compression sont répartis en quatre classes selon la pression mesurée au niveau de la cheville :

- classe I entre 10 et 15 mmHg ;

- classe II entre 15,1 et 20 mmHg ;

- classe III entre 20,1 et 36 mmHg ;

- classe IV supérieure à 36 mmHg.

Le choix de la classe prescrite est fonction de la pathologie. Par exemple, la Haute autorité de santé (HAS) recommande la classe II ou la classe III pour les varices montrant une insuffisance veineuse certaine et dont le diamètre est égal ou supérieur à 3 millimètres. L’observance est un paramètre essentiel de l’efficacité du traitement, sachant que le traitement par compression d’une insuffisance veineuse implique le port de bas à vie.

Les effets bénéfiques de la compression sont connus depuis le Néolithique (5000-2500 Av. J.-C). Des gravures rupestres de cette période montrent en effet des hommes avec des jambes bandées. Les anciens Hébreux, les Grecs et les Romains utilisent également les bandages compressifs pour soigner les ulcères des membres inférieurs. Au XVIIe siècle, le chirurgien Fabricio d’Aquapendente (1537-1619) cite le bas lacé en cuir de chien. Richard Wiseman (1622-1676), chirurgien anglais, utilise aussi des bas lacés pour traiter les varices, les œdèmes et les ulcères. Au XIXe siècle, la fabrication de fils élastiques à partir du caoutchouc naturel révolutionne la compression. Les premiers bas élastiques sont fabriqués en Allemagne vers 1874. Il faut attendre 1943 pour que la pression en mercure mesurée à la cheville devienne le paramètre de classement des bas de compression médicale.

Avant d’être tricotés, les fils élastiques font l’objet d’un guipage : ils sont couverts de fils non élastiques (synthétiques ou naturels comme la laine par exemple) pour en maîtriser la force et l’allongement. La fabrication sur des métiers à tricoter circulaire donne la forme aux bas et apporte aussi 90 % de la compression. Une fois le tricot obtenu, on confectionne les chaussettes, les bas ou les collants. Les produits subissent ensuite un traitement thermique qui va stabiliser le tricot. En effet, la durée de vie d’un dispositif doit être d’au moins six mois. À noter que la technicité nécessaire pour fabriquer un bas de compression demande des technologies et des machines très spécifiques pour le tricotage et le guipage de fils élastiques. Cette technicité permet d’obtenir la précision, la maîtrise et la durabilité de la compression, quelle que soit la morphologie à équiper, à associer à un taillage permettant un confort pour un port quotidien de ce traitement. Autre vaste volet d’innovation : les matériaux. Les fils en polyamide et surtout en élasthanne, dans les années 80, permettent de fabriquer des bas plus fins et plus résistants. Ils peuvent en outre être teints. Jusque-là, les bas étaient surtout de couleur beige. La palette de couleurs était donc réduite. Offrir de nouveaux coloris correspond à la demande des patients et permet aussi une meilleure observance. Les microfibres transparentes, à la fin des années 90, marquent une nouvelle étape dans l’amélioration du confort des bas et leur finesse. Les bas de « grand-mère », épais, deviennent de véritables collants alliant compression médicale et esthétique. Les techniques de fabrication évoluent en parallèle. Le confort des dispositifs pour chaque situation (âges, activité, température etc.) est également l’un des axes d’innovation de ces dernières années avec l’introduction de matières spécifiques (fibres techniques selon la fonctionnalité voulue : lin pour la fraîcheur, laine pour la chaleur...). Vers 2005, les machines permettent de tricoter des motifs, mais également des produits sur mesure sans couture. En effet, des innovations ont été portées sur les coutures et les systèmes de fixation-tenue des produits. De nouvelles couleurs comme le rose fuchsia, le bleu ou le vert apparaissent. Si ces coloris ne sont pas les plus vendus, ils montrent aux patients que les bas de compression peuvent désormais être portés avec tous les styles. Dans le même temps, les gammes de bas et de chaussettes pour hommes se développent afin de répondre aux attentes des patients, qui souhaitent des chaussettes de compression ressemblant à des chaussettes de ville.

Tous ces éléments améliorent non seulement le confort des patients mais également l’observance. Porter tous les jours et en toutes saisons des bas ou des chaussettes de compression est essentiel pour le traitement de l’insuffisance veineuse. L’enjeu pour les industriels est donc de donner aussi envie de les porter grâce à des gammes étoffées. A l’avenir, de nouveaux matériaux, comme les nanofibres, pourraient ainsi être utilisés.

L’utilisation de bandes de compression (ou contention) afin de traiter les œdèmes remonte au Néolithique et aux Egyptiens. L’invention des fibres élastiques au XIXe siècle marque un tournant dans l’histoire de la compression. Les bandes de compression médicale sont indiquées dans la prévention et le traitement de l’insuffisance veineuse, des ulcères veineux et toutes sortes d’œdèmes dont le lymphœdème.

La compression médicale est le traitement de base des affections veineuses chroniques et des ulcères veineux des membres inférieurs. Elle est également indiquée dans le traitement des lymphœdèmes dus à un dysfonctionnement du système lymphatique. On retrouve aussi son utilisation pour le traitement des œdèmes post-traumatiques et/ou post-chirurgie. Les affections veineuses chroniques sont ordonnées selon la classification CEAP (Clinique-étiologique-anatomique-physiopathologique, voir tableau ci-dessous). La compression est recommandée à partir du stade C2 qui correspond à la présence de varices dont le diamètre est égal ou supérieur à 3 mm. La Haute autorité de santé (HAS) répertorie, dans un rapport de 2010, plusieurs mécanismes d’action « supposés » :

- sur l’hémodynamique veineuse : la compression s’opposerait à l’hyperpression veineuse et permettrait de réduire le reflux veineux dans le réseau superficiel, le volume de sang résiduel et la pression veineuse à la marche ;

- sur la stase veineuse : elle permettrait « de réduire de 50 % le calibre des veines jumelles diminuant ainsi le risque des lésions endothéliales à l’origine d’une thrombose et s’opposerait à la stase veineuse par augmentation des vitesses circulatoires » ;

- sur les tissus : la compression aurait un effet anti-œdémateux et favoriserait l’oxygénation tissulaire ;

- dans le lymphœdème : elle augmenterait la pression hydrostatique interstitielle et améliorerait la microcirculation lymphatique.

La pose de bandes de compression forme un bandage qui va exercer une contre-pression sur le membre. Cette pression, mesurée en millimètres de mercure (mmHg) ou en hectopascal (hPa), dépend à la fois des caractéristiques techniques de la bande, notamment en termes d’allongement, et de la technique de pose (nombre de couches de bande appliquées et tension exercée sur la bande). La tension est fonction de l’allongement de la bande qui correspond au pourcentage d’étirement de celle-ci par rapport à sa longueur au repos. Selon la HAS (Haute autorité de santé), les bandes peuvent être classées selon leur allongement maximum. On distingue ainsi trois types de bandes : à allongement court (élasticité comprise entre 10 % et 100 %) ; à allongement long (élasticité supérieure à 100 %) ; sans allongement ou inélastiques (élasticité inférieure à 10 %). Les bandes peuvent également être classées selon leur comportement élastique ou non. On distingue alors deux catégories : bandes élastiques retrouvant leur longueur initiale après avoir été étirées ; bandes non élastiques conservant un allongement résiduel après avoir été étirées.

En France, le terme de contention est encore employé pour désigner les bandes sans allongement mais, comme le relève la HAS, « le terme de compression est utilisé en tant qu’appellation générale pour désigner tantôt la compression par un textile élastique, tantôt la compression par un textile inélastique ». Les bandes à allongement court et autres systèmes de compression rigides exercent une pression élevée lorsque le patient marche : quand le muscle du mollet est en exercice, la résistance de la bande crée un effet de massage, ce qui force le sang à remonter et améliore le retour veineux. En revanche, au repos, la pression exercée par ces bandages est faible. Les bandes à allongement long, quant à elles, maintiennent une pression constante, que le patient soit actif ou au repos, sans massage significatif. En outre, les bandes peuvent être sèches (c’est-à-dire uniquement en textile), adhésives (elles adhèrent sur la peau et sur elles-mêmes) ou encore cohésives (auto-adhérentes, elles n’adhèrent pas à la peau).

Selon la pathologie, la HAS recommande certains types de bandes. Par exemple, elle préconise les bandes sèches à allongement court ou long pour le traitement de l’œdème chronique. Les bandes sèches inélastiques ou les bandes sèches à allongement court sont indiquées pour le lymphœdème. Les bandages sont toujours employés dans une première phase de traitement visant à réduire l’œdème. Le traitement de maintien ou de consolidation se poursuit avec des bas de compression pour les membres inférieurs ou des manchons pour les membres supérieurs. En ce qui concerne l’ulcère veineux ouvert, la HAS recommande jusqu’à guérison : les bandages multitypes en première intention, les bandes sèches inélastiques ou à allongement court ou les bandes enduites. La pose des bandes est primordiale pour que le bandage s’avère efficace et que la bonne pression soit exercée sur le membre. Ce geste technique est réalisé par des professionnels de santé (infirmier, médecin, kinésithérapeute). Lorsque le traitement dure plusieurs mois, le patient peut être amené à poser lui-même son bandage. Il est alors formé dans le cadre d’un programme d’Éducation thérapeutique du patient (ETP).

Des gravures rupestres montrent que les bandages de contention sur les jambes sont utilisés depuis la période du Néolithique, soit entre 5 000 et 2 500 Av. J.-C. « Cette tradition est transmise aux Egyptiens. Les bandages des momies sont réalisés avec des bandes de contention. Le mythe fondateur d’Isis et d’Osiris repose sur la contention, relate le Dr Christian Gardon-Mollard, médecin angiologue et spécialiste en médecine vasculaire. Il s’agit du traitement le plus ancien et il est parvenu jusqu’à nous sans modification. Il y a 4 000 ans ou aujourd’hui, la bande est toujours constituée d’un tissu. » Le papyrus de Smith, datant de la 17e dynastie égyptienne (1650-1552 Av. J.-C.), mentionne dans ses 48 chapitres du Livre des plaies les pansements compressifs comme traitement des blessures. Hippocrate (450-350 Av. J.-C.) évoque les pansements textiles dans « De medici officina » et explique qu’ils poussent le sang vers le haut, tout en conseillant le repos et l’immobilité. Aulus Cornelius Celsus (14 Av. J.-C.-50 Apr. J.-C.), qui a écrit un traité de médecine, utilise des bandes de lin. La laine et le cuir sont aussi utilisés. Au Moyen-Age, Guy de Chauliac décrit en 1363 le pansement comme traitement mécanique des varices. En 1446, un traité anonyme de chirurgie indique un traitement qui donne un pansement rigide, protecteur, occlusif et adhérent pour l’ulcère de jambe. Avec l’apparition du caoutchouc au XIXe siècle, la compression prend un autre essor avec l’avènement des bandes élastiques.

Depuis cette époque, le principe des bandes de compression n’a pas changé, mais des innovations ont permis d’améliorer l’efficacité, le confort et l’observance du dispositif. Le traitement dure en effet plusieurs jours ou semaines et n’est pas très agréable pour le patient notamment en raison de la pression parfois élevée qu’il doit supporter et des bandes directement appliquées sur la peau. Ainsi, des bandes de ouate sont vendues depuis plusieurs années afin d’être appliquées sur le membre sous la bande de compression pour protéger la peau et assurer un meilleur confort au patient.

Dans les années 2000, les « étriers » font leur apparition. Il s’agit de faciliter la pose de la bande sur la jambe du patient. La bande est ainsi cousue à l’un de ses bouts, ce qui permet de l’enfiler sur le pied et de bien la positionner pour l’enrouler sur le membre. A la même époque, les industriels proposent un étalonnage des bandes pour assurer que la pression visée sera bien exercée sur le membre inférieur.
Le dispositif comporte sur sa longueur un
marquage à intervalles réguliers dont l’objectif est de vérifier que la bande est posée avec la bonne tension et le bon recouvrement (de moitié, des deux tiers...). Lors de l’étirement de la bande, le rectangle ou l’ovale apposés sur le tissu doivent se transformer en carré ou en cercle pour indiquer que la tension correcte est atteinte. De même, le marquage sert de repère pour effectuer le bon recouvrement.

Ces paramètres sont importants comme l’explique le Pr Marc-Antoine Pistorius, médecin vasculaire au CHU de Nantes : « Le choix du dispositif médical est important, mais la bonne pratique de sa mise en place est essentielle. Or, lorsque nous avons réalisé des mesures de la pression sous les bandes de compression, seulement la moitié des patients avait la pression cible à la cheville, l’autre moitié non. L’efficacité n’était donc pas atteinte pour parvenir à la cicatrisation de l’ulcère ».

Les bandages multitypes sous formes de kit deviennent également une nouvelle option pour les professionnels de santé. Le principe est de superposer des bandes à allongement court et des bandes à allongement long pour une compression efficace à la fois au repos et à la marche lorsque le patient est actif.  D’abord composés de 4 bandes, les systèmes multitypes sont désormais disponibles en 2 bandes : plus fins, ces derniers permettent d’améliorer la qualité de vie et le confort du patient.  La ou les bandes à allongement court contribuent à la rigidité du système, pour une meilleure efficacité sur le retour veineux, tout en rendant la pression au repos plus supportable par le patient qu’avec une bande élastique. Dans certains systèmes, la bande à allongement court intègre en outre le capitonnage au tissu compressif pour un meilleur confort. La ou les bandes à allongement long apportent la pression complémentaire pour atteindre le niveau thérapeutique ; lorsqu’une bande cohésive est incluse, elle maintient le dispositif en place en prévenant le glissement. Autre avantage : les bandages multitypes peuvent être portés jusqu’à sept jours sans être changés en fonction de la fréquence de renouvellement des pansements en cas d’ulcère ouvert. « Le patient peut garder la compression la nuit, ce qui favorise l’observance. La pose est aussi sécurisée grâce à l’étalonnage. Enfin, le dispositif est particulièrement confortable pour le patient », remarque le Pr Pistorius dont des études antérieures ont montré que, « dans la vraie vie », deux tiers des patients ne portent pas correctement et régulièrement la compression.

Plus récemment, les industriels ont également mis sur le marché des bandes sans caoutchouc, les fils élastiques étant fabriqués avec de l’élasthanne. Ces bandes sont destinées aux patients et professionnels de santé allergiques au latex. La fermeture des bandes fait aussi l’objet d’innovations. Ainsi, depuis 2013, des bandes avec des velcro, au lieu d’agrafes, sont commercialisées, permettant un repositionnement de la bande si nécessaire.

Un enjeu de santé publique

« 1 à 2 % de la population âgée de plus de
70 ans présente un ulcère veineux et plus de 2 % des personnes âgées de plus de 80 ans. L’ulcère veineux représente le troisième recours en santé publique,
explique le
Pr Marc-Antoine Pistorius, médecin vasculaire au CHU de Nantes. Nous savons depuis longtemps que la compression est le traitement de base de l’ulcère veineux même lorsqu’il est actif et ouvert. Si la pression obtenue est de 30 à 40 mmHg à la cheville en moyenne, les phénomènes hémodynamiques et tissulaires sont réversibles. Un ulcère peut ainsi guérir en trois mois. »

Le manchon de compression médicale permet de stabiliser le lymphœdème d’un membre supérieur, qui peut notamment apparaître après le traitement chirurgical d’un cancer du sein.

Le manchon de compression médicale est indiqué dans le traitement du lymphœdème des membres supérieurs. Assorti ou non d’une mitaine ou d’un gantelet, il permet de stabiliser dans la durée le lymphœdème du bras qui est un gonflement provoqué par le ralentissement ou le blocage de la circulation de la lymphe. Celle-ci s’accumule de façon anormale dans les tissus sous-cutanés. Le lymphœdème peut survenir après une intervention chirurgicale du cancer du sein et un curage axillaire (ablation des ganglions axillaires, ganglions lymphatiques situés au niveau de l’aisselle). Cet effet secondaire peut être majoré lorsque la chirurgie est associée à la radiothérapie. « Une femme sur cinq ayant subi une opération pour traiter un cancer de sein aura un lymphœdème plus ou moins important », observe le Dr Stéphane Vignes, chef de service à l'hôpital Cognacq-Jay, une unité de soins spécialisée dans le traitement du lymphœdème. Le manchon est également prescrit pour le traitement du lymphœdème primaire, dû à une anomalie du système lymphatique. Cette pathologie est cependant plus rare (2 cas sur 10 000 personnes, selon le Dr Vignes).

Le manchon exerce une pression externe en différents points du membre supérieur qui permet de contenir et de stabiliser l’œdème. La compression permet ainsi d’augmenter la pression interstitielle et de prévenir l’accumulation du liquide dans les tissus, d’améliorer le drainage tissulaire, de stimuler les contractions lymphatiques, ce qui favorise l’écoulement lymphatique et veineux vers le haut.

La compression a aussi pour effet de dégrader le tissu fibroscléreux qui peut se former et « durcir » l’œdème.

Les manchons de compression sont répartis en classes selon la pression exercée et mesurée au poignet : 15 à 20 mmHg, 20 à 36 mmHg, supérieure à 36 mmHg. La HAS recommande d’utiliser la pression maximale tolérée par le patient, sachant que le manchon est à porter tous les jours. « L’objectif est d’avoir un lymphœdème de plus petit volume le plus longtemps possible », précise le Dr Vignes. Le manchon est assorti d’une mitaine ou d’un gantelet selon la topographie de l’œdème sur le membre supérieur et « si cela est compatible avec l’activité quotidienne » précise la HAS.

Le traitement du lymphœdème par compression médicale est toujours associé à d’autres mesures : drainages lymphatiques manuels, exercices sous bandages, soins de peau (le lymphœdème entraîne une fragilisation de la peau). Comme pour les maladies veineuses chroniques, l’observance est un facteur-clé de la réussite du traitement. Le manchon doit par conséquent être confortable.

Les premiers manchons sont commercialisés dans les années 40. Ils sont tricotés avec des fils élastiques en latex ou en élasthanne qui subissent un guipage, c’est-à-dire qui sont recouverts d’un fil de coton ou de polyamide. Deux techniques de tricotage existent : le tricot à plat et le tricot circulaire. La technique du tricot à plat ou rectiligne fournit des tricots plats qui sont ensuite cousus pour former un manchon « rectiligne ». La technique du tricot circulaire permet d’obtenir un tricot en forme de tube et sans couture. Ce type de manchon présente l’avantage d’être plus souple. Le manchon rectiligne, quant à lui, est adapté à la morphologie du patient.

Au fil du temps, les fabricants ont amélioré les manchons en termes de confort. Ces innovations visent aussi une meilleure observance. Le manchon se porte en effet quotidiennement quelle que soit la saison. L’évolution des métiers rectilignes et des technologies permettent maintenant de fabriquer des produits avec les caractéristiques du rectiligne mais sans couture. Dans les années 2010, les fabricants ont commencé à proposer des manchons avec des parties de fixation comportant moins de silicone afin d’être mieux tolérées. Les gammes de coloris se sont enrichies. Si le beige et le noir demeurent les couleurs de base, les patientes peuvent choisir d’autres teintes comme le bordeaux ou le vert. L’objectif est qu’elles puissent assortir leur manchon à leurs vêtements.

Un traitement en deux phases

Le traitement du lymphœdème comprend deux phases. La première, dite « intensive », vise à réduire le volume de l’œdème par l’application de bandes sèches à allongement court ou inélastiques et de dispositifs de capitonnage. Cette phase peut durer de quelques jours à 6 semaines. Les bandages sont à porter jour et nuit. La deuxième phase vise le maintien par le port de manchons de compression la journée et de bandages la nuit.

Le port quotidien de bandages compressifs est impératif pour réduire ou contenir les œdèmes ou cicatriser un ulcère veineux. Afin de faciliter l’observance du traitement, des bandes repositionnables avec une pression adaptée sont proposées aux patients.

Le « wrap » (« emballer » en anglais) repose sur l’utilisation de bandes inélastiques ajustables et repositionnables grâce à des systèmes de scratchs ou « velcro » pour les maintenir. Ce dispositif de compression est indiqué dans le traitement initial de réduction des œdèmes chroniques et des lymphœdèmes (œdèmes provoqués par un dysfonctionnement lymphatique) des membres inférieurs et supérieurs. Il est également prescrit pour le traitement des ulcères veineux. La pression exercée par les bandes non élastiques sur le membre permet de favoriser le retour veineux et lymphatique et d’améliorer le drainage tissulaire.

Le wrap désigne une famille de dispositifs dont des manchons pour les bras ou des leggings pour les jambes. Le système est composé de plusieurs bandes inélastiques et parallèles qui se chevauchent afin de ne laisser aucun espace entre elles. La fixation est assurée par des languettes ou attaches auto-agrippantes. Ce mode de fermeture permet de garantir le bon positionnement du bandage et de le réajuster au fur et à mesure de la réduction du volume du membre. La bonne pression est assurée par le serrage ou le desserrage de chacune des bandes et grâce à une graduation qui indique la pression. « En fait, le wrap s’enfile sur la jambe ou le bras. Il peut aussi se garder la nuit car le patient peut desserrer les bandes et diminuer la pression du dispositif. Par exemple, la pression peut être de 40 mmHg le jour et entre 15 et
20 mmHg la nuit, les fortes pressions ne sont pas recommandées en position allongée »,
souligne le Dr Marlène Coupé, médecin vasculaire.

Le brevet du « wrap » a été déposé en Amérique du Nord en 1975, mais il n’a été disponible en France qu’à partir des années 2000. Son utilisation est encore confidentielle alors qu’il représente une véritable innovation. Le manchon est réalisé en nylon, polyuréthane et élasthanne qui apporte l’élasticité puisque le wrap ne contient pas de latex. Le dispositif est facile et rapide à enfiler et enlever. Le système de « velcro », qui permet l’ajustement, constitue également une autre amélioration pour le patient puisqu’il n’est plus nécessaire de refaire le bandage pour diminuer la pression ou l’adapter à la réduction du volume du membre. De fait, le wrap est prévu pour s’adapter à une augmentation de 5 % ou à une diminution de 10 % de la circonférence du membre. En outre, la bonne pression délivrée est garantie pendant toute la durée de port du système. En effet, un « outil » d’aide peut être fourni avec certains dispositifs. Adapté à la circonférence du membre, il permet d’étalonner, de réajuster et de contrôler la pression délivrée à tout moment. Des graduations sur les bandes donnent aussi des repères aux patients pour ajuster les pressions indiquées par le médecin. « Des études ont démontré la reproductibilité des pressions grâce à l’utilisation de cette carte », remarque le Dr Coupé. Après un apprentissage, le patient peut, par conséquent, utiliser seul le dispositif. « Cette innovation permet aux patients de gérer eux-mêmes le dispositif et de les rendre autonomes. Elle améliore l’observance du traitement », constate le Dr Coupé. En effet, la pose de bandages multi-types (bandes à allongement court et à allongement long) nécessite l’intervention d’un professionnel de santé à l’hôpital lors de la phase initiale de réduction et, par la suite, au domicile. De plus, de nombreux patients ne mettent plus de bandages nocturnes pendant la phase de maintien, ce qui met en péril les résultats thérapeutiques. Le wrap, lui, favorise l’autonomisation du patient avec une adhésion et une observance plus élevées au traitement. Il améliore aussi la qualité de vie des personnes souffrant d’un lymphœdème. Enfin, il offre aussi aux professionnels de santé un gain de temps lors de la mise en place du dispositif.

Les vêtements mobilisateurs offrent une nouvelle approche du traitement des lymphœdèmes des membres supérieurs et inférieurs. Ils associent en effet différents niveaux de pression sur le membre sans recourir à plusieurs dispositifs. L’objectif est non seulement de réduire et de contenir l’œdème mais aussi d’assouplir la peau.

Les vêtements mobilisateurs de l’œdème sont indiqués dans le traitement des lymphœdèmes primaires et secondaires des bras et des jambes. Ils sont utilisés en phase initiale, lors de l’hospitalisation des patients, afin de réduire l’œdème, et en phase de maintien ou de consolidation, la nuit, en relais du traitement diurne. Un patient atteint d’un lymphœdème secondaire porte ainsi le jour un manchon de compression et, la nuit, un vêtement mobilisateur. « L’orthèse reste un dispositif de compression mais elle « mobilise » l’œdème grâce à la pression irrégulièrement exercée sur le membre. Elle assouplit également les tissus dont la peau », explique le Pr Isabelle Quéré, médecin vasculaire au Centre hospitalier universitaire de Montpellier.

Le principe du vêtement mobilisateur est d’exercer une pression différenciée sur le membre. Concrètement, des pressions plus fortes sont exercées sur certaines zones et des pressions moins fortes sur d’autres. Ces différences de pression sont possibles grâce à des cubes de mousse intégrés dans les bandes qui composent l’orthèse. « Ces différences de pression ont un effet mobilisateur de l’œdème. Elles créent un effet de ”massage” », décrit le Pr Quéré. Le différentiel de pression entre la zone d’appui des cubes et leur pourtour favorise l’écoulement du liquide lymphatique et améliore le drainage des tissus. La répartition des cubes de mousse provoque également un effet de « cisaillement » des tissus sous-cutanés œdématiés qui assouplit les zones cutanées fibrosées ou sclérosées.

L’histoire des vêtements mobilisateurs commence il y a une quinzaine d’années avec l’idée d’utiliser le capitonnage en mousse, appliqué sous les bandes de compression afin de créer des zones de pression et de dépression. Des essais sont alors réalisés au CHU de Montpellier avec des petits cubes de mousse appliqués à divers endroits du membre. Les résultats s’avérant positifs, un industriel de dispositifs de compression se lance dans la fabrication en enchâssant les cubes de mousse entre deux bandes non tissées. Les premiers produits mis à disposition des professionnels de santé sont des plaques et des bandes mobilisatrices. Ces dispositifs, qui peuvent être appliqués directement sur la peau, sont utilisés sous les bandages en phase de réduction des lymphœdèmes.

Par la suite, le concept est élargi à l’élaboration de vêtements mobilisateurs grâce à l’intégration du dispositif dans les orthèses. Ces produits se déclinent pour les membres supérieurs et inférieurs, s’enfilant sur le bras ou la jambe. Réalisés avec de l’élasthanne, les vêtements sont souples et élastiques et exercent une pression supportable par les patients. Les vêtements mobilisateurs sont également ajustables au volume du membre grâce à des attaches auto-agrippantes et différents crans de serrage. L’observance représente un enjeu en matière de traitement du lymphœdème. Simplifier le quotidien des patients en proposant des orthèses faciles à mettre, confortables et légères, permet une meilleure observance. Pour le traitement du lymphœdème du bras, le manchon peut comprendre une mitaine, qui comporte aussi des cubes de mousse plus petits. « Les vêtements mobilisateurs de l’œdème combinent plusieurs principes actifs - compression, drainage lymphatique, effet de massage et facilité de mise en place et d’ajustement de la tension quand cela existe - qui en font un produit adapté à l’autotraitement », souligne le Pr Quéré.

L’étude POLIT*

L’objectif de l’étude POLIT était de décrire l’efficacité et la tolérance des traitements pendant la phase initiale de Traitement décongestif intensif (TDI) du lymphœdème

et six mois après cette phase. L’étude multicentrique a porté sur 306 patients présentant un lymphœdème du membre supérieur ou inférieur. Pendant le TDI, la réduction médiane du volume du lymphœdème était de 31,0 % (suivie d’une ré-augmentation de volume médian de 16,5 % après six mois de traitement d’entretien). 75,5 % des patients rapportaient des lourdeurs de membre à l’inclusion dans l’étude contre 42,3 % à la fin du TDI et 62,6 % à la fin du suivi. Pendant le TDI, 18,4 % des patients se sont plaints de rougeurs de peau et 15,7 % de marques de compression. En revanche, les lésions de frottement n’ont abouti à l’arrêt du traitement que dans 1,4 % des cas. Le TDI diminue le volume du lymphœdème et les lourdeurs handicapantes de membre mais le bénéfice s’atténue lors des six premiers mois du traitement d’entretien. L’amélioration du traitement d’entretien est donc essentielle pour que le bénéfice du TDI persiste sur le long terme.

* « Observatoire multicentrique des traitements décongestifs du lymphœdème en France : étude POLIT »,

I.Quéré, Service de médecine et maladies vasculaires, hôpital Saint-Éloi, Montpellier France.

Les veines ont pour rôle de faire remonter le sang des membres vers le cœur. Le sang est donc poussé vers le haut du corps par différents mécanismes dont les contractions musculaires. Les contractions des muscles des mollets permettent de générer une pression afin de lutter contre la pesanteur. Pour éviter les reflux du sang dans les pieds, les veines sont aussi pourvues de valves qui empêchent le sang de redescendre. Les veines superficielles des membres inférieurs (veines saphènes) peuvent cependant se dilater, s’allonger et se déformer. Elles deviennent alors des varices. Ce phénomène est généralement dû à une altération de la structure de la paroi veineuse. La dilatation des veines entraîne également un dysfonctionnement des valves qui se disjoignent et laissent refluer une partie du sang vers le pied.

Le laser permet l’occlusion des varices par traitement endoluminal, c’est-à-dire la fermeture de ces veines en rapprochant leurs parois. « En fait, on colle les parois de la veine grâce à la chaleur générée par l’énergie produite par le laser », détaille le Dr Guillaume Stalnikiewicz, phlébologue.

Le laser émet une onde produisant de l’énergie qui va chauffer les parois de la veine. Le fait de chauffer un tissu dénature le collagène qu’il contient. Les propriétés adhérentes du collagène sont alors amplifiées et vont permettre de « coller » la veine par l’écrasement des parois sur elles-mêmes et leur adhérence. Le degré de chaleur dépend de la couleur de l’onde et de sa puissance. Une trop forte chaleur risque en effet de brûler non seulement la veine mais les tissus qui l’entourent. Aujourd’hui, la longueur d’onde généralement utilisée pour le traitement des varices est de 1 470 nanomètres. Ce qui permet d’obtenir une puissance de 70 Joules par centimètres ou 10 Watts pendant 7 secondes. La norme de 60J/cm à 70J/cm fait en effet consensus dans le milieu médical.

L’onde agit directement dans la varice par l’introduction d’une fibre optique dans la veine. « La varice saphène à traiter fait l’objet d’un cathétérisme au point le plus bas du reflux tronculaire préalablement identifié par écho-Doppler. La fibre laser, qui est un dispositif stérile à usage unique, est alors introduite dans sa gaine à proximité de la jonction saphène, puis avancée hors de sa gaine pour être précisément placée sous contrôle échographique à environ 2 cm de cette jonction », décrit la Haute autorité de santé dans son rapport d’évaluation technique sur l’occlusion de veine saphène par laser par voie veineuse transcutanée (décembre 2016). Lorsque la fibre optique est positionnée à l’intérieur et en haut de la veine à traiter, le médecin la tire alors tout au long de la varice afin d’effectuer des « tirs » de laser durant un temps donné.

Pour éviter les risques de brûlure, une anesthésie locale appelée anesthésie tumescente est pratiquée. Il s’agit d’injecter du liquide (lidocaïne diluée dans un volume variable de soluté cristalloïde) dans le compartiment saphène, sous contrôle échographique. « Cette tumescence doit alors produire une analgésie, prévenir les lésions thermiques de proximité et doit limiter le volume sanguin résiduel afin d’optimiser l’efficacité de l’occlusion par laser, écrit la HAS. L’absence de sédation du patient doit lui permettre de signaler toute perception douloureuse permettant à l’opérateur d’adapter, voire arrêter l’énergie laser appliquée afin de prévenir l’apparition de lésions thermo-induites (paresthésie, brûlure cutanée). » « Pour vider les veines, le patient est positionné la tête légèrement en bas, précise le Dr Stalnikiewicz. En effet, il ne faut pas que le sang s’échauffe à la place de la paroi en faisant écran, sinon on court le risque d’une moindre efficacité du traitement. »

C’est Albert Einstein qui, en 1905, émet l’hypothèse que la lumière est constituée de quanta d’énergie, de photons et que l’énergie associée aux photons est directement proportionnelle à la fréquence de la lumière. Douze ans plus tard, en 1917, il publie un article sur l’émission stimulée, qui est la base de fonctionnement du laser. Mais à l’époque, les chercheurs estiment qu’il n’est pas possible de construire un appareil pouvant produire de la lumière par émission stimulée. Il faut attendre le milieu des années 50 pour que des prototypes soient construits. L’Américain Charles Townes met au point, avec son beau-frère Arthur Schawlow, les concepts du faisceau cohérent. En 1957, Charles Townes commence à travailler sur les problèmes liés à la fabrication d’un dispositif émettant du rayonnement infrarouge ou de la lumière visible, et avec Arthur Schawlow, sur l’utilisation d’une cavité résonnante pour amplifier la lumière. Ils déposent une demande de brevet en 1958. En 1960, Thédore Maimann fabrique le premier laser opérationnel en découvrant que les ions de chrome d’un rubis artificiel émettent de la lumière rouge lorsqu’ils sont irradiés par la lumière verte d’une lampe au xénon. Un an après, le laser à hélium-néon est inventé. Pour autant, le terme de laser, acronyme de l’expression anglaise Light Amplification by Stimulated Emission of Radiation (amplification de la lumière par émission stimulée de rayonnement), n’est pas employé avant 1965.

L’industrie mais aussi la communauté médicale s’intéressent très vite au laser. L’ophtalmologie est la première spécialité médicale à utiliser le dispositif conçu par Maimann. A l’automne 1961, Charles
J. Campbell et Charles Koester, médecins de New-York, détruisent la tumeur rétinienne d’un patient avec un laser. La technologie est ensuite employée en dermatologie et en chirurgie notamment. En 1999, le laser fait son entrée dans le domaine endovasculaire : Carlos Boné, un médecin espagnol, publie les premiers résultats de traitements endoluminaux des veines saphènes par laser à diode de 810 nanomètres (nm). Le laser à diode a effectivement fait son apparition en 1998. En 2004, Matthiew P. Goldmann, R. Weiss, Jean-François Van Cleef ou Christian Lebard utilisent un retrait motorisé et continu de la fibre optique, ce qui induit un tir du laser continu. Entre 2006 et 2008, des fibres radiales sont développées. Elles permettent de mieux diriger la lumière du laser sur les parois de la veine et de délivrer l’énergie de façon plus précise. En 2009,
F. Pannier propose le laser à 1 470 nm pour le traitement des varices. Cette longueur d’onde permet de pénétrer dans les tissus moins profondément. Ce qui évite des dommages thermiques détruisant les cellules et prévient les douleurs et inflammations post-opératoires. L’emploi de lasers avec une longueur d’ondes de 1 470 nm se généralise dans les années 2010. Les industriels travaillent sur les systèmes de retrait motorisé afin de faciliter le retrait continu du cathéter à vitesse constante, mais également sur des fibres optiques graduées qui donnent le tempo pour son retrait et des systèmes d’alarme sonore afin de prévenir l’opérateur qu’il retire la fibre trop vite. « A l’avenir, j’espère que le laser permettra d’aller dans des territoires qui sont pour l’instant inaccessibles afin de les traiter », conclut Dr Stalnikiewicz. L’histoire n’est pas finie.

L’occlusion des varices saphènes peut également être réalisée par radiofréquence. Ce traitement thermique a le même objectif que celui du laser : il s’agit de chauffer les parois de la veine pour qu’elles adhèrent sur elles-mêmes. La radiofréquence est notamment utilisée pour l’occlusion des varices
de grande veine saphène mais n’est pas contre-indiquée pour la petite veine saphène.

Une sonde endovasculaire, reliée à un générateur, est introduite dans la veine et va permettre d’appliquer un courant sinusoïdal sur la paroi variqueuse. L’énergie ainsi administrée produit un échauffement au contact des tissus. Cette chaleur dénature la paroi veineuse, ce qui induit sa contraction et par conséquent son occlusion. L’énergie utilisée est le produit de la puissance de radiofréquence choisie par le temps d’application. Généralement, le « jet » d’énergie dure plusieurs secondes. Il est administré par segment de quelques centimètres lors du retrait de la sonde.

La procédure nécessite un contrôle échographique ainsi qu’une anesthésie tumescente. Les risques sont en effet identiques à ceux du laser : une énergie trop forte peut produire des lésions de proximité comme des brûlures cutanées ou une paresthésie.

L’utilisation d’un courant électrique pour traiter des varices date du XIXe siècle. En 1846, l’Italien Milani envoie un courant galvanique à deux aiguilles et provoque une électrocoagulation. Ce traitement conduit à la disparition des varices de son patient en huit séances. En 1851, à Naples, Ferdinand Palasciano croise ces mêmes deux aiguilles et obstrue ainsi la grande veine saphène terminale avant d’appliquer le même principe aux varices des jambes. Les techniques d’électrocoagulation sont encore expérimentées dans les années 60 et 70. La radiofréquence n’est toutefois utilisée qu’à la fin des années 90, aux États-Unis, après autorisation de la Food and Drug Administration, l’agence du médicament américaine. M.P. Goldman présente ainsi en 2000 ce nouveau traitement thermique de la grande veine saphène sur 10 patients. Quatre ans après, différentes vitesses de retrait de la sonde endoveineuse et différentes températures sont comparées par A.W. Zikorus.

Les dispositifs de radiofréquence se sont diversifiés depuis cette date. Des sondes avec des éléments chauffants de différentes longueurs sont apparues sur le marché, modifiant la température et impliquant un retrait séquentiel et non continu comme auparavant.

La vapeur d’eau est une technique endoveineuse utilisée depuis à peine une dizaine d’années. La vapeur envoyée dans la veine génère de la chaleur qui provoque une réaction thermique. Les parois variqueuses se contractent. Ce phénomène aboutit à l’occlusion de la veine.

De l’eau stérile liquide est chauffée puis transformée en vapeur d’eau grâce à un courant électrique circulant dans une résistance de chauffe. Cette vapeur d’eau est ensuite véhiculée à l’intérieur de la veine à traiter au moyen d’un cathéter. En sortant du cathéter, la vapeur se condense en laissant sa chaleur sur les parois de la veine. Le cathéter peut être retiré centimètre par centimètre afin de chauffer de longs segments variqueux et la bonne diffusion de la vapeur permet de réaliser un traitement homogène. Le médecin choisit l’énergie qu’il veut administrer en fonction du diamètre et de la longueur de la veine, ce qui définit la quantité de vapeur d’eau à délivrer.

C’est le Dr Henri Mehier, cancérologue, qui pense le premier utiliser la vapeur d’eau pour détruire des tumeurs cancéreuses. En 2007, le Dr René Milleret, médecin vasculaire, décide d’employer ce procédé pour le traitement des varices. Pour générer la vapeur d’eau et l’injecter dans la veine à traiter, le premier dispositif de traitement des varices par vapeur utilise une pompe haute pression et un microtube chauffant. D’autres produits ont ensuite vu le jour avec l’utilisation de la pression de vaporisation pour l’injection de la vapeur d’eau dans la veine.

« Nous avons d’abord réalisé des essais in vitro sur des segments de veine avant de procéder à des essais cliniques multicentriques avec une équipe de la Faculté de Lyon », relate le Dr René Milleret. Ce spécialiste participe à l’élaboration du dispositif qui obtient le marquage CE. « Le traitement est peu douloureux, ajoute le Dr Milleret. Lorsque l’on demande aux patients d’estimer la douleur, ils indiquent en moyenne 1,5 sur une échelle de dix. » Le traitement endothermique devrait se développer.

La sclérothérapie a pour objectif de faire disparaître les varices par l’injection d’un produit, sclérosant ou non, dans les veines. À l’heure actuelle, deux types de produits sont utilisés : la colle (non sclérosante) et la mousse.

L’injection de produits, sclérosants ou non, dans les veines produit une réaction qui, à terme, induit l’oblitération de la varice. La sclérothérapie est notamment indiquée pour les varices de petit diamètre. Elle permet de stabiliser la maladie veineuse superficielle. Elle est également utilisée pour le traitement des télangiectasies, qui sont des affections cutanées se caractérisant par la dilatation permanente de petits vaisseaux sanguins, et de certaines varices réticulaires (varices de petit calibre, hypodermiques, disposées en mailles de filet d’un calibre inférieur à 4 mm).

Il s’agit d’injecter dans la varice un produit irritant qui va provoquer un spasme veineux puis un épaississement de la paroi. La veine devient alors un cordon fibreux. La sclérothérapie peut être réalisée avec des solutions sclérosantes sous forme liquide ou de mousse. Les produits liquides sont déjà prêts à l’emploi. Ils sont employés pour pratiquer des sclérothérapies classiques. En revanche, la mousse doit être préparée manuellement avant l’intervention. La mousse sclérosante est un mélange de gaz et de liquide à propriétés tensioactives. Le gaz doit être bien toléré ou physiologique. Celui le plus utilisé est l’air ambiant mais l’oxygène ou le dioxyde de carbone peuvent aussi être employés. Les bulles formées par le mélange doivent avoir un diamètre inférieur à 100 micron-millimètres.

L’injection du produit est effectuée par seringue ou cathéter, généralement au niveau du genou. Elle ne nécessite aucune anesthésie du patient. Plusieurs séances sont cependant nécessaires. Depuis plusieurs années, l’emploi de la mousse s’est développé. « C’est la technique la moins invasive pour supprimer les varices, explique le Dr Gilles Gachet, médecin vasculaire. Elle est réalisée en ambulatoire et ne nécessite pas d’arrêt de travail. Elle provoque également peu de douleurs, ce qui est un avantage pour le patient. D’ailleurs, les personnes qui subissent une sclérothérapie repartent du cabinet en marchant (technique ambulatoire totale). » La sclérose des varices par la mousse se pratique sous guidage échographique. « Elle semble augmenter considérablement l’efficacité de la sclérothérapie, surtout pour le traitement des gros troncs veineux et des récidives après chirurgie », observe la Société de chirurgie vasculaire et endovasculaire de langue française.

L’injection de produits dans les veines est loin d’être récente. En 1664, J.D. Major publie un livre qui relate des injections intraveineuses « Chirurgia Infusoria ». A partir du XIXe siècle, différents produits sclérosants sont utilisés : le perchlorure de fer en 1853, l’iode potassique aqueux en 1864, le mercure corrosif en 1910. Six ans après, en 1916, P. Lister propose d’utiliser des produits irritants pour la sclérose après avoir observé que les substances irritantes utilisées dans le traitement de la syphilis provoquent des thromboses des veines du bras. En 1932, la glycérine chromée fait son apparition. En 1966, l’oxypolyéthoxydodécan, un anesthésiant local déjà utilisé en 1936, devient un produit sclérosant largement employé.

La mousse sclérosante est créée en 1939 par S. Mc Ausland qui prélève l’écume d’un flacon de morrhuate secoué et l’injecte dans la veine. Il faut néanmoins attendre que Juan Cabrera et Alain Monfreux popularisent le procédé dans les années 90. Quelques années plus tard, J. Cabrera Garrido fabrique une micromousse très compacte où l’air est remplacé par du CO² avec une brosse rotative. En 2013, les Recommandations européennes pour la sclérothérapie dans le traitement des affections veineuses chroniques sont élaborées pour la sclérose par liquide et mousse à la demande de 23 sociétés européennes de phlébologie. Ce guide consacre, si l’on peut dire, la sclérose par mousse.

L’arrivée de la colle biologique

La dernière innovation en matière de traitement des varices concerne l’utilisation d’une colle biologique pour coller les parois des petites veines saphènes et des grandes veines saphènes. Le principe de colle médicale date des années 50 pour « recoller » les plaies superficielles. Ce type de produit est ensuite utilisé en chirurgie dans les années 2000 pour emboliser les malformations artério-veineuses. Ce qui conduit ensuite à l’utiliser pour le traitement des varices.

La colle est injectée dans la veine par un cathéter relié à un pistolet qui envoie la colle à intervalles réguliers. La veine est alors compressée pour que les parois adhèrent entre elles. Ce procédé ne relève pas de la sclérothérapie. Il ne nécessite pas d’anesthésie tumescente. Pour l’instant, l’utilisation de colle est encore restreinte. Mais les professionnels de santé sont persuadés que l’avenir est aux traitements rapides et efficaces qui n’immobilisent pas les patients et leur permettent de reprendre très vite leurs activités quotidiennes.

Les coils permettent d’emboliser les veines sans avoir recours à la chirurgie. Cette technique est avant tout utilisée pour traiter les varices pelviennes des femmes et les varicocèles chez l’homme.

Les coils sont des spires métalliques fibrées avec des fibres de polyesther. Ils sont introduits dans la veine abîmée afin de l’emboliser, c’est-à-dire de l’obstruer. Les coils sont utilisés pour traiter les varices pelviennes chez la femme. « Cette pathologie est mal connue. Elle touche notamment les femmes qui ont déjà eu des grossesses et sont en âge de procréer. Elle est exceptionnelle chez les femmes qui n’ont pas eu d’enfants, explique le Dr Olivier Hartung, chirurgien vasculaire au CHU Nord de Marseille. Les varices pelviennes provoquent des douleurs chroniques plus ou moins invalidantes, des règles douloureuses et des troubles urinaires. » Les coils permettent également d’emboliser les varicocèles chez l’homme,
c’est-à-dire les varices des testicules.

L’embolisation des varices pelviennes ou des varicocèles se déroule sous anesthésie locale. Les coils sont mis dans un tube métallique placé en bout du cathéter. Une fois le cathéter en place dans la veine, le médecin pousse les coils dans le cathéter jusqu’à l’endroit où il veut les déposer. Une fois dans la varice, les coils, qui étaient compressés dans le tube, reprennent leur forme initiale. Les fibres de textile des coils permettent de retenir le sang et de former en quelque sorte un bouchon. Le diamètre des coils s’adapte à la grosseur des varices. Il peut ainsi varier de 2 millimètres à 2 centimètres. L’implantation de coils peut être complétée par l’injection de produits sclérosants via le même cathéter.

Les coils sont utilisés depuis les années 90. La technique a d’abord été développée pour traiter les anévrismes cérébraux par voie endovasculaire. Les spirales métalliques sont mises en place au sein de la poche anévrismale. En 2015, ils représentaient environ 70 % des traitements des anévrismes, selon le Pr Alain Bonafé, coordinateur du département de neuroradiologie au CHU de Montpellier. Depuis plusieurs années, la gamme des coils s’est largement étoffée : outre leur diamètre, leur calibre, leur forme, leur souplesse et leur longueur sont variables. A partir de 1990-1995, leur emploi s’est élargi au traitement des varices pelviennes et des varicocèles. Les coils représentent en effet une alternative à la chirurgie invasive. « Dans le cas des varices pelviennes, nous observons avec les coils 80 % d’amélioration et 50 % des patientes deviennent asymptomatiques, explique le Dr Hartung. Les coils donnent de bons résultats ».

La pose de stent, ou stenting, permet de rouvrir les veines rétrécies dans lesquelles le sang circule mal. Ce traitement endoveineux constitue une alternative à la chirurgie des veines profondes.

Le stent est une sorte de petit ressort métallique. Placé dans une veine rétrécie, il permet de rétablir son diamètre initial afin d’assurer la circulation du sang. En fait, le principe du stent est l’opposé de celui du coil : le stent ouvre la veine alors que le coil la bouche. Le stenting est pratiqué pour traiter l’obstruction des veines profondes comme les veines iliaques. Celle-ci peut être due à un resserrement de la veine ou à une phlébite. Le blocage total (on parle alors d’oblitération) ou partiel de la veine peut générer une insuffisance veineuse chronique des membres inférieurs.

Le stent préchargé sur un cathéter, disposant ou non d’un ballonnet, est introduit dans la veine par voie transcutanée. Le stent est placé dans la veine pour écarter les parois veineuses (soit à l’aide du ballonnet, soit par l’autoexpansion du stent) et il se déploie pour maintenir le diamètre de la veine ainsi élargie. Le stenting nécessite seulement une anesthésie locale.

Jusqu’au milieu des années 90, on procède à un pontage veineux pour traiter l’obstruction des veines. Ce pontage, réalisé selon les principes du pontage artériel, consiste à mettre en place un « conduit » permettant de remplacer un vaisseau sanguin en le branchant en amont et en aval de la zone oblitérée. Le premier pontage veineux est réalisé en 1948 par un chirurgien uruguayen, EC. De Palma qui a ainsi substitué la grande veine saphène aux veines iliaques. La pose de stent permet une chirurgie moins invasive que le pontage. Elle ne nécessite qu’une à deux journées d’hospitalisation. Depuis quelques années, les industriels ont développé de nouveaux stents plus petits, adaptés aux diamètres des veines. Les matériaux ont également évolué : les stents veineux sont constitués d’alliages à base d’acier inoxydable et de nitinol.

La thrombectomie pharmaco-mécanique

La thrombectomie consiste à retirer un thrombus ou un caillot de sang qui s’est formé dans une veine profonde. En phase aigüe, deux traitements existent : la perfusion de thrombolytiques (thrombolyse) qui va désagréger le caillot ou la thrombectomie chirurgicale. Ces deux techniques nécessitent une hospitalisation relativement longue et comportent des risques d’hémorragie. La thrombectomie pharmaco-mécanique représente une nouvelle alternative notamment pour les phlébites iliaques. Développée depuis dix ans aux Etats-Unis et cinq ans en France, cette technique endoveineuse consiste à retirer mécaniquement le caillot. Un cathéter comportant des trous est introduit dans la veine et injecte un fluide contenant des thrombolytiques. Le fluide est ensuite extrait de la veine et le thrombus aspiré. L’intervention dure deux à trois heures et le patient est hospitalisé un ou deux jours.

Le risque de thrombose est élevé lors d’opérations chirurgicales. La compression pneumatique intermittente permet d’éviter ce risque en favorisant le retour du sang grâce à une pression exercée de façon séquentielle.

La thrombose résulte d’une formation d’un caillot de sang (thrombus) au sein du réseau veineux. Ce caillot peut alors bloquer totalement ou partiellement la circulation sanguine. Généralement, la thrombose survient au niveau des membres inférieurs. On distingue la thrombose veineuse superficielle, qui touche les veines de petit calibre (veines saphènes), et la thrombose veineuse profonde (phlébite), qui apparaît dans les veines de plus gros calibre, au cœur du système musculaire de la jambe. Des complications de la thrombose veineuse peuvent survenir. En effet, le caillot de la phlébite peut migrer jusqu’à l’artère pulmonaire et l’obstruer, ce qui provoque une embolie pulmonaire. Cette pathologie est grave car elle a des conséquences pulmonaires et cardiaques qui mettent en jeu le pronostic vital de la personne.

Deux grands facteurs de risques conduisent à la formation d’un thrombus : l’insuffisance veineuse et l’hypercoagulabilité du sang. Celle-ci favorise la formation d’un caillot en raison d’un déséquilibre du système de coagulation du sang qui augmente ses capacités à coaguler. Elle est notamment liée à certaines situations : tabagie, grossesse, obésité, ou immobilité des membres inférieurs lors d’une chirurgie, d’un alitement prolongé, d’un voyage de plusieurs heures en transport.

« Durant une opération chirurgicale, l’objectif est de réduire le temps de stase veineuse dans les membres inférieurs afin d’éviter le risque de thrombose et d’embolie pulmonaire, explique le Pr David Nocca, Professeur de chirurgie digestive au CHU de Montpellier et directeur scientifique de la Société française et francophone de chirurgie de l’obésité et des maladies métaboliques. Il s’agit donc de diminuer la coagulabilité du sang lors de l’intervention et durant la phase post-opératoire précoce. Pour cela, nous utilisons de l’héparine, une molécule qui fluidifie le sang mais qui peut être à l’origine de complications hémorragiques. De ce fait, la mise en place de bas de compression intermittente des membres inférieurs pourrait permettre de réduire ce risque en diminuant les doses d’héparine à utiliser. » Le risque de thrombose est particulièrement élevé dans les opérations de chirurgie bariatrique de patients en situation d’obésité, qui ont un indice de masse corporelle supérieur à 40.

Le principe de la compression pneumatique intermittente est d’exercer une pression sur les membres par séquences et non de façon continue. Concrètement, des manchons de compression sont appliqués sur les membres inférieurs du patient immobilisé. Ils peuvent couvrir uniquement les mollets ou bien la jambe entière jusqu’en haut de la cuisse. Ils sont réglables grâce à des attaches auto-agrippantes. Les deux manchons ressemblent à des bouées qui peuvent se gonfler. Ils sont connectés entre eux et reliés à un moteur (pompe ou compresseur) qui va pulser de l’air et permettre de gonfler et dégonfler alternativement les manchons. Le temps de compression dure généralement 11 secondes et le temps de repos 60 secondes, sachant qu’une veine « se remplit » de sang en 45 secondes environ. La durée des séquences de compression et de dépression peut être réglée. De même, la pression exercée peut être programmée et différenciée selon les parties du membre : par exemple, 45 millimètres de mercure (mmHg) à la cheville, 40 mmHg au mollet et 30 mmHg à la cuisse. En revanche, la pression est dite uniforme lorsqu’elle s’exerce à un seul endroit du membre, c’est-à-dire la cheville ou le mollet. « Nous utilisons la compression pneumatique intermittente durant toute la durée de l’intervention, soit aujourd’hui une heure environ, puis jusqu’à ce que le patient reprenne la marche, c’est-à-dire le lendemain de l’opération. Pendant 10 jours, le patient portera ensuite des bas de contention classiques », précise le Pr Nocca.

La compression par appareil n’est pas un concept récent puisqu’il date du début du XIXe siècle. La première description d’un appareil de compression date de 1835, publiée par Murray, un médecin anglais. L’appareil alors mis au point permet d’obtenir en alternance une action de pression et de vide durant quelques minutes à plusieurs heures. Il faut cependant attendre 1930 pour que des appareils de compression de Landis et Herman soient mis sur le marché pour le traitement des maladies vasculaires et 1946 pour une commercialisation aux États-Unis. En 1955, Sampson et Kirby décrivent le premier appareil de compression intermittente. Celui-ci comprend 14 compartiments qui se gonflent au rythme de 20 cycles par minute. Un dispositif fabriqué selon ce principe est commercialisé en 1981 par Zelikoswski. Son emploi se développe notamment dans les années 2000.

La technique de la compression intermittente se diffuse ensuite en Europe. En France, elle est utilisée depuis 2005. Son développement a lieu à partir de 2008, suite à la crise sanitaire liée à l’héparine contaminée importée de Chine qui provoque alors des décès aux Etats-Unis et en Allemagne. Depuis une dizaine d’années, le dispositif est également amélioré. Les compresseurs sont désormais plus petits et transportables et plus ergonomiques aussi. Les manchons sont à patient unique,
ce qui garantit les conditions d’hygiène au bloc opératoire.

La compression pneumatique intermittente est avant tout utilisée en chirurgie bariatrique. « C’est une technique relativement récente et nous disposons de très peu d’études de haut niveau de preuves mais la compression intermittente est recommandée par les sociétés savantes pour la chirurgie bariatrique et digestive à risque thromboembolique », souligne le Pr Nocca. Elle n’est toutefois pas réservée à ces spécialités : elle est également utilisée en réanimation et peut l’être dans toute autre indication chirurgicale et médicale dès lors que le patient présente un risque élevé selon les scores de risques. « Il s’agit d’une technique non invasive et sans risque de complication », conclut le Pr David Nocca.

Selon l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale),
entre 50 et 100 000 phlébites et 40 000 embolies pulmonaires surviendraient chaque année en France.  « La mortalité liée à l’embolie serait de 6 % dans la phase aigüe et de 26 % à un an », note l’institut, qui estime que le nombre de
250 000 phlébites superficielles (dans les veines superficielles) est sans doute sous-évalué.



Dernière mise à jour : 05/05/2021